Du public au commun

Revue du MAUSS n°35, 2010/1, pp. 111-122

Pierre Dardot, Christian Laval, 2010

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Résumé :

La posture classique d’un certain « anti-libéralisme » consiste à dénoncer dans l’offensive néolibérale une marchandisation du monde et à lui opposer la défense des services publics nationaux pour les uns et des biens publics mondiaux pour les autres. Autant dire que la lutte politique se maintient sur un terrain bien connu où s’affrontent le Marché et l’État. Les « antilibéraux », sans trop le savoir ou sans trop s’en inquiéter, s’installent en fait sur le terrain de l’adversaire lorsqu’ils prennent fait et cause pour la production de services par l’État au nom d’une opposition qui s’est constituée précisément pour faire du marché la règle et de l’État l’exception. Ce travers est aussi pénalisant que l’aveuglement volontaire à l’égard des pratiques bureaucratiques étatiques au prétexte qu’il ne faudrait pas faire le « jeu du marché ». On sait pourtant que ce genre de raisonnement a coûté historiquement aux « forces de progrès » : un discrédit durable. Sortir du capitalisme néolibéral, c’est aussi sortir de ce double jeu du Marché et de l’État, c’est définir une politique qui ne confondrait plus l’opposition à la marchandisation et la promotion de l’administration bureaucratique. Cette tâche est aujourd’hui d’autant plus nécessaire que le néolibéralisme montre tous les jours que le Marché et l’État désignent, non des entités indépendantes engagées dans un « face à face » planétaire pour la suprématie, mais des processus profondément enchevêtrés et des logiques étroitement imbriquées.

Pour œuvrer à la définition de cette politique, on peut s’appuyer sur la problématique de l’association, de la solidarité, de la mutualité, qui a nourri toute la réflexion du mouvement ouvrier au cours de son histoire [Chanial, 2009]. Aujourd’hui, cette problématique semble trouver un nouveau souffle et peut-être de nouveaux fondements dans la résurgence de la thématique du commun. Rien n’est joué cependant, tant l’emprise de la doctrine économique dominante tend à s’exercer sur ceux qui, aujourd’hui, tentent de penser la question des « biens » communs.

Sources :

www.researchgate.net/publication/277042281_Du_public_au_commun