Association for Serva Seva Farms (ASSEFA)-Inde. Une approche holistique de développement local et communautaire visant l’autosuffisance
Article publié dans le Bulletin International de Développement Local Durable, #60,
Yvon Poirier, juillet 2009
En d’autres langues : Español
RENSEIGNEMENTS/IDENTIFICATION
1. Auteur de la fiche : coordonnées, fonctions
Date de rédaction de la fiche
Yvon Poirier, 27 juillet 2010
Fiche réalisée suite à une visite en 2002 (à l’invitation d’ASSEFA) et de nombreux documents reçus régulièrement depuis cette date.
2. Identification de l’expérience :
Nom de l’organisation, du réseau, du programme d’action
Association for Serva Seva Farms (ASSEFA)
Coordonnées : Adresse postale complète
279, Avvai Shanmugam Road
Royapettah
Chennai -600014
3. Localisation
Pays ; Inde
« Infra » (régionale et/ou locale). Dans 7 états différents de l’Union indienne.
4. Domaine.s d’activité : (cocher une à 2 cases)
X Agriculture, alimentation
X Services locaux à la population (publics ou privés) tels que transports, santé, éducation, sports…
X Vie culturelle
X Entretien des ressources naturelles et environnement
X Finance
X Expressions citoyennes, réseautage…
DESCRIPTION
Article publié dans le Bulletin International de Développement Local Durable, #60, 1er juillet 2009.
La marche silencieuse de la force invisible:ASSEFA : 40 ans de développement communautaire en Inde
À l’occasion du 40e anniversaire de ses activités, l’Association for Serva Seva Farms (ASSEFA) de l’Inde a publié un recueil de divers articles, dans un livre au titre évocateur : « La marche silencieuse de la force invisible ».
En mars 2008, ce mouvement, d’inspiration Gandhienne regroupe 9 766 villages dans 8 états différents de l’Union indienne. Ainsi, au total, ce sont 803 000 familles, donc plus de 3,5 millions de personnes qui bénéficient des multiples activités d’ASSEFA. On prévoit qu’en 2010, celles-ci concerneront 1 million de familles.
Il n’est pas possible dans le présent article de décrire en détail l’ensemble des activités d’ASSEFA. Nous présentons ici un ensemble d’éléments qui donnent une idée du travail réalisé depuis 2002, date à laquelle Yvon Poirier a effectué une visite sur place. Nous renvoyons le lecteur à la consultation des Bulletins n°4 et 12 pour se faire une meilleure idée du chemin parcouru en 7 ans.
La vision: une approche holistique
Au début en 1968, il s’agissait d’aider les paysans sans terres à créer des villages sur des terres obtenues par le mouvement Gandhi. Ainsi, au début, ASSEFA travaillait pour les villageois. À l’étape suivante, ASSEFA travaille avec tout le monde, y compris les pauvres. En effet, depuis 15 ans, il est plus approprié de parler de développement par le peuple, dans lequel l’association remplit des fonctions de planification et de soutien. L’approche est holistique et vise la création de villages auto-suffisants et durables.
Le concept de fiduciaire (trustee en anglais) est au cœur des principes qui prévalent. «Chacun devrait vivre sur cette Terre-Mère en tant que Fiduciaire avec tout ce qu’il a, et acquiert pour le bénéfice de la communauté dans laquelle il vit ». Ainsi, ASSEFA fait confiance à la communauté et aux villageois. Ils sont libres de s’organiser entre eux, de gérer l’argent et les ressources matérielles afin d’en tirer un bénéfice mutuel, et si possible d’en faire bénéficier les villages voisins.
La micro-finance : un outil d’entraide animé par des femmes
L’organisation des villages repose en bonne partie sur les Groupes d’entraide féminins (GEF). En mars 2008, 32 000 GEF regroupent 500 000 femmes dans 113 Sarvodoya Mutual Benefit Trusts (SMBT). En 1996, les SMBT sont devenus propriétaires de la Sarvodaya Nano Finance Limited, une institution financière reconnue par la Banque de l’Inde. Ainsi, depuis 1998, la micro finance est la propriété des femmes. Elle est gérée par elles-mêmes, avec l’aide des professionnels d’ASSEFA. En 2008, 172 000 femmes ont bénéficié de prêts. Le taux de remboursement a été de 99,66% !
Dans cette approche holistique, ASSEFA s’assure que les villages peuvent satisfaire leurs besoins : santé, éducation, logement, activités génératrices de revenus (tels que production de lait, petites entreprises, vente directe de produits agricoles dans des marchés, etc.).
construire la cohésion sociale
Une emphase majeure est la construction de la paix dans les communautés. Comme nous le disions en 2005, ASSEFA, avec l’aide d’organisations amies en Europe, et le soutien de divers récipiendaires du prix Nobel de la Paix, entre autres, le Dalai Lama du Tibet, Mairead Corrigan Maguire d’Irlande et Aug San Suu Kyi du Myanmar, a obtenu que l’Assemblée générale de l’ONU déclare la «Décennie 2001-2010 pour l’éducation à la paix des enfants du monde». Cette formation est intégrée au programme des écoles ASSEFA.
Une autre activité importante a été instaurée ces dernières années, ce sont les «mariages communautaires». En Inde, le mariage demeure une institution importante. Au delà des deux personnes, il s’agit d’un rite sacré qui unit deux familles. Ainsi, la plupart des mariages sont «arrangés». Même s’il s’agit d’un évènement festif, pour bien des familles pauvres c’est un désastre financier. Car en Inde, malgré son illégalité depuis 1961, la dot demeure la norme. Les mariages communautaires, qui unissent simultanément des couples hindous, musulmans et chrétiens, ne constituent pas seulement une promotion du respect entre les religions, c’est aussi une activité de renforcement de la communauté et de lutte contre la pauvreté. Les GEF qui organisent ces mariages réduisent de 50% les frais pour les familles concernés. En janvier et février 2006, dans 7 villages du Tamil Nadu (état du Sud de l’Inde), 340 couples se sont mariés et 49 000 personnes ont participé aux célébrations. Impliquer les villageois met en place les conditions pour venir en aide, si besoin, aux nouveaux mariés. « En somme, les mariages communautaires sont un puissant outil de construction de la cohésion sociale et l’entraide dans les villages ».
Perspectives pour les 40 années à venir.
Réaliser la justice sociale et économique, créer des villages prospères, demeure une priorité. Cependant, même si «l’empowerment des plus vulnérables demeure un travail continu dans toutes les sociétés, et que la durabilité est non seulement une question de survie de projets ou d’organisations, notre habilité à comprendre les implications de l’interdépendance est devenue une préoccupation globale car c’est probablement le facteur clé qui déterminera la survie ou non de l’humanité toute entière, au siècle prochain».
La globalisation aggrave considérablement les écarts entre les riches et les pauvres au niveau de la planète, et à l’intérieur de chaque pays. « Certes, l’économie après le pétrole ouvre des perspectives de changement de cap mais elle provoquera aussi des ruptures et de la misère pour bien des gens. Sans une gestion effective de l’économie globale, non seulement pour assurer les besoins essentiels de tous, mais aussi pour s’adapter aux changements environnementaux, l’avenir de l’humanité au siècle prochain est à haut risque.»
Silent March of The Invisible Force
Sarvodaya Action Research Centre, Madurai, Tamil Nadu, September 2008, 248
Addendum (Juillet 2010)
ASSEFA annonce la mise en place d’une nouvelle initiative. En collaboration avec l’université «Indira Gandhi National Open University (IGNOU), un Collège Communautaire ASSEFA à été accrédité afin d’offrir des formations (études post secondaires) pour les jeunes des villages. Différents certificats, pour des formations de 6 ou de 12 mois selon le cas, seront offerts dans diverses techniques tels que : gestion de production laitière, approche agricole intégré (y incluant agriculture bio), utilisation d’ordinateurs, non-violence et paix, ainsi qu’une formation sur «empowerment des femmes et développement». Des premières cohortes débutent ses formations dans les prochaines semaines.
ANALYSES ET COMMENTAIRES (portée générale de l’initiative)
1. Quelle économie l’action a-t-elle ou peut-elle générer ?
Possiblement la plus grande initiative de la planète (au moins 4 millions de personnes) construite sur une approche holistique visant l’autosuffisance des villageois.
2. Comment l’action a t’elle augmenté la prise de pouvoir et la responsabilité dans les solutions mises en oeuvre ?
L’ensemble des décisions concernant le niveau des villages sont prises par l’assemblée des villages respectifs. Quand ça déborde le village individuel, ce sont des représentants des villages qui décident ensemble. L’association ASSEFA est toujours en appui. Ne décide jamais à la place de la population. En somme, c’est un développement autogéré.
3. Quelles articulations l’action a-t-elle utilisées ou produites pour réussir des percées
Les politiques gouvernementales, ou l’environnement sociopolitique, ne sont pas toujours favorables. Cependant, ASSEFA organise des activités et de l’éducation afin de combattre ces difficultés. Par exemple, des activités pour promouvoir l’harmonie dans la société entre personnes de cultures différentes (hindoues, musulmanes et chrétiennes), le statut de la femme par la promotion de l’éducation, etc.
4. Quelles propositions de droit commun l’action permet-elle d’élaborer ?
En tant que tel, ASSEFA vise l’autonomie. Assefa ne propose pas de politiques gouvernementales de soutien et d’appui. Néanmoins,
Sources :
Bulletin International de Développement Local durable n°60